Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/206

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1677 reté de votre cœur, pour me rassurer sur la perte de votre enfant : je ne sais, ma fille, où vous prenez cette dureté ; je ne la trouve que pour vous ; mais pour moi, et pour tout ce que vous devez aimer, vous n’êtes que trop sensible ; c’est votre plus grand mal, vous en êtes dévorée et consumée : ah ! ma chère, prenez sur nous, et donnez-le au soin de votre personne ; comptez-vous pour quelque chose, et nous vous serons obligés[1] : vous ne sauriez rien faire pour moi qui me touche le cœur plus sensiblement. Je suis étonnée[2] que le petit marquis et sa sœur n’aient point été fâchés du petit frère : cherchons un peu où ils auroient pris ce cœur tranquille ; ce n’est pas chez vous assurément.

Mon fils s’en va à la fin du mois : il n’y a pas moyen de s’en dispenser. Le Roi a parlé encore, comme étant persuadé que Sévigné a pris le mauvais air des officiers subalternes de cette compagnie[3]. De l’autre côté, M. de la Trousse[4] mande : « Venez, venez boiter avec nous. » Il faut partir : ainsi il n’y a plus d’eaux. Je ne laisserai pas d’aller à Vichy ; nous en parlerons. Ce voyage sera de pure précaution ; car je me porte fort bien et ne fais nulle attention sur mes mains. Mme  de Marbeuf les a eues deux ans comme je les ai, et puis elles se sont guéries. Ah ! c’est un homme bien amoureux que Monsieur votre frère : j’admire la peine qu’il se donne pour rien, pour rien du tout. Il a été surpris dans une conversation fort secrète par un mari ; ce mari fit une mine très-chagrine, parla à sa femme très-rudement : l’alarme étoit

  1. 10. « Et nous vous serons obligés de toutes les marques d’amitié que vous nous donnerez par ce côté-là. » (Édition de 1754)
  2. 11. Cette phrase n’est pas dans le texte de 1734.
  3. 12. La compagnie des gendarmes-Dauphin. (Note de Perrin.)
  4. 13. Il étoit capitaine-lieutenant de cette compagnie. (Note du même.)