Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 5.djvu/240

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traiteriez selon mon mérite. Je commence déjà à souhaiter de retourner sur mes pas : je vous défie de croire que ce ne soit pas pour vous. Je ne sentirai guère la joie ni le repos d’arriver. Ayez au moins quelque attention à la vie que je vais faire. Adieu : si vous m’aimez, vous n’aimez pas une ingrate.

Voilà en l’air ce que j’ai attrapé, et voilà à quel style votre pauvre frère est condamné de faire réponse trois fois la semaine : ma fille, cela est cruel, je vous assure. Voyez quelle gageure ces pauvres personnes se sont engagées de soutenir ; c’est un martyre, ils me font pitié : le pauvre garçon y succomberoit sans la consolation qu’il trouve en moi. Vous perdez bien de n’être pas à portée de cette confidence, ma chère enfant. J’écris ceci hors d’œuvre, pour vous divertir en vous donnant une idée de cet aimable commerce. Je vous conjure de brûler ces deux feuilles qui ne tiennent à rien, de peur d’accident. Songez que vous aurez cette sincère et naturelle créature : il ne faut qu’un malheur[1].


630. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Paris,, mercredi 28e juillet.

Je[2] suis à Paris pour ce chien de papillon : je n’ai pas encore mis entièrement le pied dessus, c’est-à-dire touché cette belle somme que vous savez. Si je ne m’étois

  1. 9. Ces deux dernières phrases ne se trouvent que dans notre manuscrit.
  2. Lettre 630. — 1. Le premier alinéa de cette lettre n’est que dans l’édition de 1754.