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1677

655. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.

À Langlar, chez M. l’abbé Bayard[1],
vendredi 24e septembre.

J’ai reçu à Vichy, ma très-chère, cette lettre du 15e dont j’étois en peine.

Je serois fâchée[2] de ne pas savoir l’histoire de ce bon curé ; il est à Semur, et M. de Trichateau[3], dont vous haïssez la gigantesque figure, nous conta à Époisse qu’il lui étoit tombé un ange du ciel dans sa ville de Semur, qui étoit un vrai saint du paradis[4] ; qu’on ne savoit ni son nom ni le sujet de son séjour ; qu’il ne se plaignoit de personne, qu’il étoit silencieux, et qu’il avoit été si touché de cette sorte de mérite, qu’il l’avoit logé chez lui et qu’il le nourrissoit[5], avec une grande joie d’avoir recueilli un tel homme. Nous écoutâmes cela, Guitaut et moi ; et comme je suis toujours alerte sur nos pauvres amis, je le priai de continuer sa générosité, et qu’assurément c’étoit un ami de la vérité : cela est plaisant, car je ne croyois point du tout que ce fût ce bon curé[6]. Je viens d’écrire à Guitaut, pour lui dire le mérite de cet homme, et le prier

  1. Lettre 635 (revue sur une ancienne copie). — 1. Il était à Paris dans ce moment-là : voyez la lettre du 4 octobre suivant. — Les mots : « chez M. l’abbé Bayard, » ne sont pas dans notre manuscrit.
  2. 2. Tout cet alinéa manque dans l’édition de 1734, qui commence ainsi : « J’ai reçu à Vichy, ma très-chère, cette lettre du 15e dont j’étois en peine, et qui m’apprend enfin vos bonnes résolutions venez, venez donc, ma fille, etc. »
  3. 3. Voyez la lettre du 25 août précédent, p. 293, note 5.
  4. 4 « Dont vous n’aimez pas la gigantesque figure… dans sa ville de Semur ; que c’étoit un saint de paradis. » (Édition de 1754.)
  5. 5. « Et que cette sorte de mérite l’avoit touché au point qu’il l’avoit pris chez lui, et le nourrissoit, etc. » (Ibidem.)
  6. 6. « Car je ne songeois point du tout à ce bon curé. » (Ibidem.) — Voyez la lettre suivante, p. 337.