Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/30

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1679 Madame, qui l’a reçue avec une extrême amitié : elle est sa tante, elle a été élevée avec elle. La reine d’Espagne va toujours criant et pleurant[1]. Le peuple disoit, en la voyant dans la rue Saint-Honoré : « Ah ! Monsieur est trop bon, il ne la laissera point aller, elle est trop affligée. » Le Roi lui dit devant Madame la Grande-Duchesse[2] : « Madame, je souhaite de vous dire adieu pour jamais ; ce seroit le plus grand malheur qui vous pût arriver que de revoir la France. » Mme la duchesse de Rohan[3] est accouchée d’un garçon ; voilà un troisième duc dans la maison de

    tembre, c’est-à-dire le lendemain du jour où Mme de Sévigné écrivait cette lettre. Le 31 août, Mme d’Osnabruck avait assisté, à Fontainebleau, au mariage de la reine d’Espagne (Gazette, p. 440).

  1. 18. Le 27 septembre (date de notre lettre), la reine d’Espagne, qui, comme nous l’avons dit, était partie le 20 de Fontainebleau pour aller dans son royaume, prenait congé, à Amboise, du duc d’Orléans son père, qui l’avait accompagnée jusqu’à cette ville (voyez la Gazette du 30 septembre). Dans les premiers jours du mois le peuple de la capitale avait eu de fréquentes occasions de voir la jeune reine, qui était venue passer plusieurs jours à Paris, et pendant ce séjour avait donné de nombreuses audiences et visité beaucoup d’églises et de couvents (voyez la Gazette du 9 septembre).
  2. 19. La grande-duchesse de Toscane avait quitté son mari pour revenir en France. Voyez tome III, p. 481, note 5.
  3. 20. La fille de Vardes, dont Corbinelli avait négocié le mariage. Elle était accouchée le 26 septembre de Louis-Bretagne de Rohan Chabot, prince de Léon, qui épousa en 1708 Françoise de Roquelaure, et mourut le 10 août 1738. Saint-Simon (tome VI, p. 152) nous a laissé de lui le portrait suivant : « Le prince de Léon étoit un grand garçon élancé, laid et vilain au possible, qui avoit fait une campagne en paresseux, et qui, sous prétexte de santé, avoit quitté le service pour n’en pas faire davantage. On ne pouvoit d’ailleurs avoir plus d’esprit, de tournant, d’intrigue, ni plus l’air et le langage du grand monde, où d’abord il étoit entré à souhait. Gros joueur, grand dépensier pour tous ses goûts, d’ailleurs avare ; et tout aimable qu’il étoit, et avec un don particulier de persuasion, d’intrigues, de souterrains et de ressources de toute espèce, plein d’humeur, de caprices et de fantaisies, opiniâtre comme son père, et ne comptant en effet que soi dans le monde. »