Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/71

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1679 ils ont beaucoup d’envie de me voir ; c’est la meilleureraison que j’aie pour m’en retourner incessamment.

Vous avez raison de supprimer la modestie de Pauline ; elle seroit usée à quinze ans : une modestie prématurée et déplacée pourroit faire de méchants effets. Vous vous moquez de remercier Corbinelli du bien qu’il dit de votre esprit ; il le trouve seul au-dessus des autres ; et quand il en parle, c’est pour dire ce qu’il pense, et non pour vous plaire, ni vous donner bonne opinion de vous. Il vouloit l’autre jour vous mettre un mot dans ma lettre sur les politesses que vous disiez pour lui ; cela ne se rencontra pas ; ce sera pour mon retour. M. et Mme  de Rohan ne trouvent pas l’invention, sur deux mille cinq cents pistoles qu’ils ont reçues des états, de lui faire un présent sous le nom du petit prince de Léon[1] Il y a de plaisantes étoiles ; celle de Corbinelli est de mépriser ce que les autres adorent. Il est vrai que j’eus beaucoup de plaisir à les entendre, l’abbé du Pile[2] et lui ; ils étoient d’accord en bien des choses ; il y en avoit de dures, sur quoi ils mâchonnoient ; M. de la Rochefoucauld appelle cela manger des pois chauds[3] ; ils en mangèrent donc, car dans cette forêt on conclut juste. Le gros abbé[4] a commencé sa charge de gazetier ; ne vous incommodez point pour les réponses ; il a un style de gazette qu’il possède mieux que moi.

  1. 6. Nous avons vu que c’était Corbinelli qui avait négocié le mariage de la fille de Vardes avec le duc de Rohan : voyez plus haut, p. 24, note 20.
  2. 7. On lit du Pile dans les éditions de 1734 et de 1754. M. Grouvelle a pensé que c’était l’abbé de Piles, qui a écrit sur la peinture, et qui lui-même était peintre. Cet abbé était attaché à M. Amelot, qui se rendit célèbre par ses ambassades. Cette circonstance rendrait vraisemblable sa liaison avec Mme  de Sévigné, qui allait souvent chez Mme  Amelot. (Note de l’édition de 1818.)
  3. 8. Voyez plus haut, p. 43.
  4. — 9. L’abbé de Pontcarré.