Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 6.djvu/98

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

1679 que vous ne m’avez jamais donné. Vous voyez que ce n’est pas inutilement que vous prenez ce soin ; le succès en est visible ; et quand je me tourmente de vouloir vous inspirer ici la même attention, vous voyez bien que j’ai raison[1], et que vous êtes bien cruelle de vous traiter avec tant de rigueur. Quelle obligation ne vous ai-je point de soulager mes inquiétudes par le soin que vous avez de vous ! rien ne me peut être plus agréable, ni me persuader davantage l’amitié que vous avez pour moi. Elle est telle que je renonce à vos grandes lettres pour avoir la satisfaction de penser que je ne vous ai point épuisée, et que je n’ai point échauffé cette pauvre poitrine. Ah ! je ne mets pas de comparaison entre le plaisir de lire vos aimables lettres, et le déplaisir de penser à ce qu’elles vous ont coûté.

Je vous prie de ne pas perdre cette eau des capucins[2] que votre cuisinier vous a portée ; c’est une merveille pour toutes les douleurs du corps, les coups à la tête, les contusions, et même les entamures, quand on a le courage d’en soutenir la douleur. Ces pauvres gens sont partis pour s’en retourner en Égypte. Les médecins sont cruels et ont ôté au public des gens admirables et désintéressés, qui faisoient en vérité des guérisons prodigieuses. Je leur dis adieu à Pompone. Faites serrer cette petite fiole, il y a des occasions où on en donneroit bien de l’argent.

J’ai reçu votre petite lettre par le mousquetaire ; elle

  1. 22. La lettre finit ici dans les deux éditions de Perrin, et tout ce qui suit ne se trouve que dans notre copie.
  2. 23. Voyez sur ces capucins la lettre du 27 septembre 1684, et les lettres des 5 novembre, 15 décembre 1684, 11 avril et 13 juin 1685. Leur ordre avait des missions en Égypte. — Voyez aussi le Mercure galant d’octobre 1679 (p. 9), où il est parlé de « ces remèdes doux et bienfaisants qui rendent si fameux en France les capucins du Louvre. »