Je demande pardon à la Providence, ma chère cousine, mais j’ai grand’peine à trouver bon que les plus jolies personnes ne soient pas toujours les plus heureuses et les plus saines.
Je suis encore à Bussy, où je fais des ajustements qui finissent la maison ; elle vous plairoit fort si vous la voyiez maintenant. Je pars pour Chaseu dans huit jours, et j’y serai jusqu’à l’hiver, que je passerai à Autun. Écrivons-nous toujours ; pour moi, je ne reçois aucune lettre qui me fasse tant de plaisir que font les vôtres.
Adieu, notre très-chère cousine et tante : nous disons très-chère, beaucoup plus encore pour le mérite que pour la rareté, car nous vous aimerions autant quand nous vous verrions tous les jours.
1680
851. — DE MADAME DE SÉVIGNÉ ET DE CHARLES DE SÉVIGNÉ À MADAME DE GRIGNAN.
C’est me renouveler les douleurs de l’éloignement, que de me faire apercevoir les travers de mes inquiétudes. Vous souvient-il des raisonnements que nous faisions sur la perte de Charleroi, lorsqu’il y avoit plus de quinze jours que Montal étoit entré dans cette place qu’il avoit secourue[1] ? J’ai eu des craintes aussi bien fondées pour vos meubles, qui étoient sous vos yeux : j’en suis fort aise ; le jour viendra, je l’espère, que nos discours seront un peu plus justes ; on tire de si loin, qu’il est impossible de
- ↑ Lettre 851. — 1. Voyez tome III, p. 175, note 1.