Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 8.djvu/321

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viennent que fort tard, et c’est le lundi que je réponds à deux. Le marquis est un peu crû, mais ce n’est pas assez I pour se récrier; sa taille ne sera point comme celle de son père, il n’y faut pas penser; du reste, il est fort joli, répondant bien à tout ce qu’on lui demande, et comme un homme de sens, et comme ayant regardé, et voulu s’instruire dans sa campagne il y a dans tous- ses discours une modestie et une vérité qui nous charment. M. du Plessis est fort digne de l’estime que vous avez pour lui. Nous mangeons tous ensemble fort joliment, nous réjouissant des entreprises injustes que nous faisons quelquefois les uns sur les autres soyez en repos sur cela : n’y pensez plus, et laissez-moi la honte de trouver qu’ma roitelet sur moi soit zert pesant fardeau J’en suis affligée; mais il faut céder à la grande justice de payer ses dettes et vous comprenez cela mieux que personne vous êtes même assez bonne pour croire que je ne suis pas naturellement avare, et que je n’ai pas dessein de rien amasser. Quand vous êtes ici, ma chère bonne, vous parlez si bien à votre fils, que je n’ai qu’à vous admirer mais en votre absence, je me mêle de lui apprendre les manèges des conversations ordinaires, qu’il est important de savoir il y a des choses qu’il ne faut pas ignorer. Il seroit ridicule de paraître étonné de certaines nouvelles sur quoi l’on raisonne; je suis assez instruite de ces bagatelles. Je lui prêche fort aussi l’attention à ce que les autres disent, et la présence d’esprit pour l’entendre vite, et y répondre cela est tout à fait capital dans le monde. Je lui parle des prodiges de présence [1]


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  1. LETTRE1102. 1. Allusion à la fable du Chêne et du Roseau (livre I, fable XXII) Le chêne un jour dit au roseau « Vous avez bien sujet d’accuser la nature; Un roitelet pour vous est un pesant fardeau. »