souhaite un pareil succès à Monsieur d’Arles. J’embrasse et j’aime passionnément ma chère Comtesse.
1192. --DE MADAME DE SÉVIGNÉ
A MADAME DE GRIGNAN.
Aux Rochers, dimanche 3è juillet.
IL y a aujourd’hui neuf mois, jour pour jour, dimanche pour dimanche, que je vous quittai à Charenton[1] avec bien des larmes, et plus que vous n’en vites. Ces adieux sont amers et sensibles, surtout quand on n’a pas beaucoup de temps à perdre ; mais pour en faire un bon usage, il en faudroit faire un temps de privation et de pénitence ce seroit le moyen de ne le pas perdre, et de le rendre aa contraire fort utile : il est vrai que cette sainte économie est une grâce de Dieu, comme toutes les autres, et qu’on ne mérite pas de l’obtenir. Il y a donc neuf mois que je ne vous ai ni vue, ni embrassée, et que je n’ai entendu le son de votre voix ; je n’ai point été malade, je n’ai point eu d’ennui marqué ; j’ai vu de belles maisons, de beaux pays, de belles villes ; cependant je vous avoue qu’il me semble qu’il y a neuf ans que je vous ai quittée. Je n’ai point eu de vos nouvelles cet ordinaire, cela me donne toujours du chagrin. Mme de Lavardin me mande qu’elle dit à Mme de Bury, au sujet du procès de Chabrilland[2] que cette dernière compte gagner « Vous avez toujours de grandes espérances ; mais un de vos amis, très-habile, n’en juge pas ainsi. Ah dit-elle,