Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/182

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1210. DE MADAME DE SÉVIGNÉ

A MADAME DE GRIGNAN.

Aux Rochers, dimanche 28è août.

JE[1] n’ai point reçu votre lettre, et j’en recevrai demain deux à la fois ; je ne sais que faire à ce mécompte, qui arrive souvent : c’est une chose bien triste que cela se rencontre précisément lorsque j’attendois avec tant d’impatience des nouvelles de cette incommodité de M. de Grignan, que j’espère qui n’aura point de suite fâcheuse, mais dont je ne laisse pas d’être fort en peine; le temps paroît long depuis vendredi à midi jusqu’au lundi à la même heure. Je reçois une lettre de notre marquis : c’est pied ou aile de vous, cela me fait plaisir. Ce joli petit capitaine me dit que c’est du plus loin qu’il lui souvienne de m’avoir écrit ; il me conte ses raisons pour ne pas écrire si souvent qu’il le voudroit ; il me parle de l’amitié de M. de Boufflers pour lui, et prétend que c’est à moi qu’il la doit2. Ce membre de phrase : «  et prétend, etc.,» n’est pas dans l’édition de 1737. ; il me dit des nouvelles de son camp, de leurs espérances pour finir la campagne, en se joignant à quelque armée ; mille douceurs à son oncle, à sa tante ; un air dans son style qui se forme, un si bon sens[2] partout, que je dis plus que jamais qu’il n’y a qu’à heurter à la porte sur tout ce qu’on veut, il y répond parfaitement. Et voyez un peu ce qu’il a répondu à cette porte de la guerre où l’on a heurté de si bonne heure[3] : l’eus-

  1. LETTRE 1210 (revue en partie sur une ancienne copie).1. Tout le commencement est ainsi abrégé dans l’édition de 1737 : « J’attends de vos nouvelles, ma fille ; mais je reçois une lettre de notre marquis ; c’est pied ou aile de vous, etc. »
  2. 3.«  Et un si bon sens. » (Édition de 1754.)
  3. 4. Ce qui suit ces mots « de si bonne heure, » jusqu’à « il semble, etc., » ne se trouve pas dans l’impression de 1737.