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̃ précautions qu’on peut desirer dans un voyage, je les trouverai dans celui-ci; et même je suis débarrassée du soin d’avoir peur, et de crier et de rougir : notre bonne duchesse se charge de tout, et je demeure avec une apparence de courage et de hardiesse, par comparaison à ce qu’elle fait voir de crainte et de timidité : on trouve ainsi le moyen d’attirer des louanges qu’on ne mérite pas. J’ai donné tous les bons ordres pour recevoir de vos lettres à Malicorne et à Vitré, et puis à Rennes : je vous écrirai dès que je le pourrai; mais ne soyez nullement en peine, si vous êtes quelque temps sans en recevoir : c’est que les postes et les temps ne se seront pas rencontrés juste. Je pars toujours avec la petite tristesse que je vous ai dite[1] le moyen de songer à l’état de vos affaires sans une vraie douleur ? La mort de Monsieur l’Archevêque vous fait encore un accablement. Je crains, sans savoir pourquoi, que l’empressement d’être à Grignan ne vous ait fait un mal solide. Le chevalier étoit un peu fâché que vous fussiez partie d’Aix sans conclure votre emprunt; il y a des affaires qu’il ne faut pas quitter : elles échappent des mains dès qu’on s’en éloigne. Dieu nous fasse la grâce de nous revoir dans quelque temps ! Dieu vous conserve ! ayez soin de votre santé; la mienne m’est considérable par l’intérêt que vous y prenez. J’ai fait ce matin encore certains adieux par rapport à vous : c’est le sel qui donne du goût à ce que je fais. Adieu, ma très-aimable Comtesse je pleure ; quelle folie! c’est que ce redoublement d’absence et d’éloignement me fait mal. Voyez M. de la Garde, soutenez-vous, ne vous laissez point accabler, servez-vous de votre courage, et mettez en œuvre les décrets de la Providence.

3. Voyez ci-dessus, p. 1 et p. 3, le commencement et le troisième alinéa de la lettre du 1er avril.

  1. 3. voyez ci-dessus, p 1 et p.3, le commencement et le troisième alinéa de la lettre du 1er avril