Savigny[1] Mme de Lavardin vint aussi, avec la marquise d’Uxelles, Mme de Mouci, Mlle de la Rochefoucauld,[2] et M. du Bois / j’avois le cœur assez triste de tous ces adieux. J’avois embrassé la veille Mme de la Fayette, c’étoit le lendemain des fêtes, j’étois tout étonnée de m’en aller ; mais, ma chère enfant, c’est proprement le printemps que j’ai été voir venir dans tous les pays où j’ai passé; il est d’une beauté, et d’une jeunesse,[3] et d’une douceur que je vous souhaite à tout moment, au lieu de cette cruelle bise qui vous renverse, et qui me fait mourir quand j’y pense.
J’embrasse Pauline, et je la plains de n’aimer point à lire des histoires : c’est un grand amusement ; aime-t-elle au moins les Essais de morale et l’Abbadie, comme sa chère maman ? Mme de Chaulnes vous fait mille amitiés ; elle a des soins de moi, en vérité, trop grands. On ne peut voyager, ni dans un plus beau vert, ni plus agréablement, ni plus à la grande, ni plus librement. Adieu, ma très-chère belle : en voilà assez pour le Pontaudemer, je vous écrirai de Caen.
1173. -- DE MADAME de SEVIGNE A MADAME DE GRIGNAN.
À Caen, ce jeudi 5è mai.
JE me doutois bien, ma chère enfant, que je recevrais ici cette lettre du 21è avril que je n’avois point reçue à Rouen; c’eût été dommage qu’elle eût été perdue : bon