Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/546

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Vous me soulagez bien l’esprit en me disant vos pensées pour Pauline, en cas que vous alliez à Paris : ce sont précisément celles que j’avois, et je n’osois vous les dire; je voulois que les vôtres parussent les premières. Toutes vos raisons sont admirables, ma bonne c’étoit celles qui m’ éloient venues ; n’en changez point : aimez cette petite créature, rendez-la digne de votre tendresse ; vous en serez toujours la maîtresse, elle ne sera point difficile à gouverner. J’ajoute à toutes vos raisons la liberté que vous aurez encore de me la donner de certains jours que vous n’en aurez point affaire. Elle ne sera point en mauvaise compagnie, et je ne vous serai peut-être pas tout à fait inutile, pour faire que jamais vous ne puissiez vous repentir de l’avoir amenée. Je ne sais si je me brouillerai avec elle, par ce conseil que je vous donne. Voilà une affaire vidée, il n’est plus question que d’aller à Paris ; ce sera, ma bonne, selon que votre requête civile sera jugée. Nous sommes d’accord de nos faits sur cet article ; nous n’avons plus rien à dire. Mme de la Fayette me mande que je n’ai qu’à songer à graisser mes bottes; que passé le mois de septembre, elle ne me donne pas un moment. Sur cela je mange des pois chauds [1]dans ma réponse, comme disoit M de la Rochefoucauld, et je n’en ferai pas moins tout ce que je vous ai dit, ma chère bonne ; mais il faut se taire jusqu’à ce qu’il soit temps de parler.

J’approuve et j’honore les bouts-rimés des auteurs d’Aix ; mais ce sont des sonnets, c’est un opéra. [2]pour

  1. 16. Voyez tome VI, p. 43.
  2. 17. Le mot est pris ici dans un sens un peu différent de lui que lui donne Bussy au tome IV, p. 317, et Corbinelli au tome VII, p, 201. Ici sans doute : œuvre difficile. « Opéra se dit d’une chose qui se fait rarement et extraordinairement, et avec de la dépense ou de la peine. » (Dictionnaire de Furetière, 1690.) -- On sait ce que Boileau, dans le IIè chant de l'Art poétique, dit de la difficulté du sonnet.