Page:Sévigné - Lettres, éd. Monmerqué, 1862, tome 9.djvu/566

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lisant tout le bonheur de cette journée et des deux autres[1] car il fut partout et perdit autour de lui cent quatre-vingts dragons ; mais pour lui, il étoit défendu de le tuer ; toutes les balles, toutes les épées n’osoient le toucher. C’est ainsi qu’elles ont leurs commissions de l’ordre de la Providence ; et par ce côté-là, Mme de Cauvîsson se peut tourmenter si elle veut, car on se fera toujours des reproches, en qualité tout au moins de cause seconde ; mais son pauvre garçon étoit où il devoit être, vous saurez bien depuis quand. J’eus donc toujours les yeux pleins de larmes, car je suis une pleureuse ; mais vous, qui avez du courage, vous m’étonnez. M. de Pompone sera bien plus touché de vos larmes que des miennes, avec raison, car je lui ai mandé aussi ma contenance en lisant cet endroit.

1295. DE MADAME DE SÉVIGNÉ AU COMTE DE BUSSY RABUTIN.

Je partis de Paris dans le temps que j’écrivis cette lettre (n° 1290, p. 552), et je n’en reçus que six semaines après à Chaseu, la réponse.

Aux Rochers, ce 13è août » 1690.

JE reçus une lettre de vous quand vous partîtes de Paris, mon cousin, qui étoit une espèce d’adieu. Au travers de tout votre courage, et de la bonté de votre tempérament, qui se défait aisément de toute mélancolie, il me paroissoit que n’ayant pas obtenu ce que vous demandiez à la cour, il vous en étoit resté au fond du cœur quelque léger chagrin. Il n’en falloit pas davantage pour m’en donner plus qu’à vous, à moi qui n’ai pas tant de force d’esprit. Je pense que dans une conversation nous

  1. 5. Nous avons vu plus haut, p. 537, note 4, que la belle action du chevalier de Pompone est du 29 juin. Il se signala encore le lendemain 30, et le 1er juillet, qui est le jour de la victoire.