du reste. La fable du Lièvre[1] est tellement faite pour votre état, qu’il semble que ce soit vous qui la fassiez :
Jamais un plaisir pur, toujours assauts divers, etc.
Vous y pourriez ajouter encore :
Corrigez -vous, dira quelque sage cervelle.
Eh ! la peur se corrige-t-elle ?
Mais vous ne pourriez pas dire :
Je crois même qu’en bonne foi
Les hommes ont peur comme moi ;
car je trouve que les hommes n’ont point de peur. C’est une heureuse vieillesse que celle de M. l’archevêque : je suis bien honorée de son souvenir. J’attaquerai un de ces jours le coadjuteur ; je lui parlerai du bon ménage que nous faisions à Paris ; je suis ravie qu’il vous aime, et plus pour lui que pour vous ; car ce ne serait pas bon signe pour son esprit et pour sa raison, que de vous être contraire. J’aime Pauline : vous me la représentez avec une jolie jeunesse et un bon naturel : je la vois courir partout, et apprendre à tout le monde la prise dePhilisbourg ; je la vois et je l’embrasse : aimez, aimez votre fille, c’est la plus raisonnable et la plus jolie chose du monde ; mais aimez toujours aussi votre chère maman, qui est plus à vous qu’à elle-même.
M. de Bailli vient de sortir : il vous fait cent mille bredouillements, mais de si bon cœur que vous devez lui en être obligée. Mon cher comte, encore faut-il vous dire un mot de ce petit garçon ; c’est votre ouvrage que cette campagne : vous avez grand sujet d’être content : tout contribue à vous persuader que vous avez fort bien fait. Je sens votre joie et la mienne : ce n’est point pour vous flatter, mais tout le monde dit du bien de votre fils : on vante son application, son sang-froid, sa hardiesse, et quasi sa témérité.
268. — DE Mme DE SÉVIGNÉ À Mme DE GRIGNAN.
Je ne vous dis rien de ma santé, elle est parfaite ; nous avons fait des visites tout le jour, M. le chevalier et moi, chez madame Ollier, madame Cornuel, madame de Frontenac, madame de Maisons, M. du
- ↑ Fable de la Fontaine, le Lièvre et les Grenouilles, livre II, fable 54.