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journal

Telle est l’épigraphe qu’il inscrit en tête de son journal. Ses premiers moments ont été consacrés aux souvenirs du passé, aux regrets ; mais la nouvelle société qui l’entoure vient le distraire, et des observations critiques sur les passagers les plus excentriques font bientôt une heureuse diversion :

De mai en juillet.
En mer.

« Mon compagnon de cabine se livre peu ; jusqu’à présent je n’ai découvert en lui que des manières anglaises, des favoris anglais et peu de cheveux. »

Portraits à la plume.

« H***, autre passager, n’est pas fait pour la vie intime, cette vie du bord, excellente école pour connaître les hommes, car on a tout le temps de les étudier. Il peut passer un instant pour un homme d’esprit, bien qu’il n’en ait pas beaucoup. Dans sa suffisance extrême, il a un certain aplomb, mais il ne saurait tromper longtemps. Il s’évertue à dire qu’il a fait deux ans de philosophie ; mais il manque de sens supérieur, le sens commun qui fait distinguer le vrai du faux et qui est aussi nécessaire à l’homme dans la vie que le bâton à l’aveugle pour se guider dans les chemins.

« Parmi les passagers de chambre, nous avons aussi deux époux de caractère opposé et que le destin a réunis dans la même cabine ; deux êtres faits pour s’accommoder ensemble comme le soleil et la lune, le couple qui donne au monde l’exemple du plus mauvais ménage, puisque