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de voyage.

Les caresses des Malais.

« Les Malais donnent à leurs enfants des noms de fruits et de fleurs. Dans la langue malaise, pour exprimer les caresses d’une mère, d’un père ou d’un amant à ses enfants ou à une femme, le verbe baiser n’existe pas, c’est le mot Ajûm qu’on emploie, dont la signification littérale est sentir, respirer. Ainsi, on ne baise pas une petite fille, une amante, on en respire le parfum comme d’une fleur que l’on sent. Une Malaise rougirait et ne comprendrait pas cette sorte de caresse du bout des lèvres ; elle dirait : « Que me veut donc cet homme… ? » Il y a quelque chose de plus suave, de plus éthéré : c’est cette aspiration de l’homme auprès d’une jeune fille dont l’odorante haleine vient se mêler à l’air qu’on respire. Les Malais sont de cet avis ; ils respirent la femme ; leurs manifestations amoureuses sont, vulgairement parlant, une sorte de reniflerie.

Le Bétel.

« L’usage du Bétel est tellement ancré dans les habitudes malaises, qu’un Malais sans sa chique est aussi impossible qu’un gouvernement sans mécontents ou la rencontre de deux parallèles. Le malais chique en marchant, en parlant, à peine suspend-il de chiquer pour manger et souvent il chique encore en dormant. Depuis les enfants de 12 à 14 ans, jusqu’aux femmes, tous ont cette affreuse coutume. C’est un dégoutant spectacle ; les lèvres sont couvertes d’une écume rougeâtre ; les dents sont noires et décharnées, les gencives sanglantes. La noirceur des dents est considérée comme une beauté chez ce peuple qui méprise les dents blanches, et les appelle dents de chien.