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de voyage.

fêtes nombreuses, toutes les affaires cessent. Les Chinois ce jour-là s’enferment chez eux, allument des feux odorants devant l’image des Dieux et des Ancêtres, et font dès le matin un tapage infernal qui dure jusqu’à la nuit. Leur musique de réjouissance est une symphonie à quatre chaudrons, espèces de timbales appelées Gong. Ils s’asseyent en face les uns des autres et frappent à tour de bras et sans dire un mot, chacun sur son instrument. C’est à peine s’ils prennent le temps de manger pour recommencer de plus belle. — Quand on passe ce jour-là dans les rues de la ville, ce tapage vous agace les nerfs. Trente chats fouettés dans un sac ne produiraient pas un vacarme plus discordant. On prétend pourtant que ce peuple a quelques beaux airs ; quant à moi, j’avoue que ce que j’ai entendu en solo ou en partie, était quelque chose de si faux, de si criard qu’il était impossible d’y saisir un motif. Outre les gongs, ils ont des violons bi-cordes, des flûtes simples, doubles ou triples, des sortes de guitares, des tam-tams, des plateaux, des sonnettes et des chaudrons en métal qui assourdissent. Les grands plateaux circulaires sont formés d’un alliage de cuivre, de zinc et d’argent. On les suspend à un cordon pour les isoler et on frappe dessus comme sur une grosse caisse avec un tampon en caoutchouc. Il n’y a pas de bruit connu en Europe qui approche de celui qu’on en tire. — J’avais déjà entendu ce bruit à Lombock dans une musique malaise où de grands plateaux étaient touchés avec un certain art et au milieu du silence de la nuit. Ces sons étranges,