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Page:Sacher-Masoch - L’Ennemi des femmes, 1879.djvu/154

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L’ENNEMI DES FEMMES

en veillée équivoque ! Mais l’autorité acquit au moins la preuve que la police était bien faite, et avait eu raison de dénoncer madame Ossokhine comme une honnête femme.

En entendant frapper à sa porte, Nadège n’eut que le temps de se vêtir et d’endosser une kazabaïka. Elle avait un peu prévu cette malice. La curiosité désappointée, quant à la personne, se dédommagea quant aux choses, et la maison fut fouillée avec un acharnement sans résultat.

Nadège croyait à une arrestation immédiate ; mais on la laissa sous le coup de cette menace, pensant qu’elle irait demander grâce au gouverneur lui-même, curieux de la connaître.

Ce fut pendant cette période de terreur préliminaire, que Petrowna vint la voir et que le vieux Gaskine, prévenu par la rumeur publique, s’était mis à sa disposition, prêt à la défendre, à l’enlever, à la cacher.

Nadège refusa tous ces secours, plus avantageux pour le gouvernement que pour elle, puisqu’ils la supprimaient, en épargnant au pouvoir l’odieux d’une persécution. Elle ferma sa porte résolument à ses amis, ne voulant l’ouvrir qu’à ses ennemis.

Pourtant un jour, un homme, grand, maigre, avec de longs cheveux gris et un visage qui racontait des combats douloureux contre la vie, insista avec tant de fièvre pour parler à madame Ossokhine, que mademoiselle Scharow reçut de Nadège l’ordre de lever pour cette fois la consigne donnée à la porte.