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L’ENNEMI DES FEMMES

En se reculant devant les nouveaux venus qu’il saluait, il s’appuya nonchalamment sur le rebord d’une table d’ébène incrustée de nacre, et, après qu’on lui eut nommé Constantin :

— Monsieur est amoureux ? demanda-t-il gaiement.

— Comme il a deviné cela ! s’écria Jaroslaw en battant des mains.

— Parbleu ! ce n’est pas difficile à deviner, reprit Diogène ; monsieur a l’œil fiévreux ; et, si vous me l’amenez, c’est probablement pour que je le guérisse.

— Oui.

— Or, je n’ai, comme médecin, qu’une spécialité.

— Devinerez-vous aussi facilement quel est l’objet de sa passion ? demanda Melbachowski.

Diogène parut se recueillir. Il examinait attentivement Constantin.

— Oui, dit-il, au bout de trois minutes, je connais l’héroïne du poème, c’est Petrowna Pirowski.

Pour le coup, les trois jeunes gens le regardèrent comme un paysan galicien regarde un escamoteur qu’il prend pour un sorcier.

Diogène jouit de ce triomphe ; mais il ne lui convenait pas de trop éblouir le nouveau venu.

— Je pourrais vous dire, reprit-il, que j’ai le don de seconde vue ; j’aime mieux vous avouer que M. Constantin porte sur lui la preuve de son amour.