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L’ENNEMI DES FEMMES

imagination en lui mettant incessamment sous les yeux des articles de contrat, plus séduisants que tous les articles de politique ou de polémique, quand Diogène entra et alla droit à lui.

— Est-ce un article de madame Ossokhine que vous lisez avec tant d’attention ? demanda le philosophe.

— Non, je n’en sais rien, je ne crois pas ! répondit le major, doublement surpris de la question et du ton dont elle était faite par le mari même de Nadège.

— Ah ! vous ne savez pas ? — reprit Diogène en allumant un cigare qu’il se mit à mâcher plutôt qu’à fumer. — C’est peut-être par modestie que vous me répondez ainsi. Je parierais que l’article est de vous ?

— De moi !

— Parbleu, il faut bien que l’apprentissage que vous faites, du métier de journaliste, finisse par vous rendre habile à écrire.

— Mais je vous jure, dit le bon major en souriant, que je n’apprends pas ce métier.

— Bah ! vous mentez !

Il y a des mots qui sont effroyables, ou tout à fait innocents, selon l’air et l’accent avec lesquels on les prononce. Le mot mentir est de ceux-là. Le major était habitué de si longue date aux plaisanteries de Diogène, il était si loin de supposer à celui-ci une intention de provocation, qu’il sourit d’abord, au lieu de s’irriter à ce mot équivoque.