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L’ENNEMI DES FEMMES

avec la permission de Diogène, enchanté qu’un autre réalisât une folie de son goût, voici ce qu’il prépara pour le lendemain.

C’était dans l’après-midi, par un beau soleil qui hâtait le printemps. On vit un cortège bizarre (il faut dire qu’on approchait du carnaval), se mettre lentement en route, à travers la foule compacte que l’annonce de la cérémonie, rapidement répandue, avait amassée dans les rues.

Il sortait de la maison de Diogène qui, ce jour-là, était depuis le matin dans l’ancienne maison de Nadège Ossokhine, au bureau du journal la Vérité, pour mieux voir passer les funérailles de son orgueil. Il avait donné carte blanche à Melbachowski, voulant se réserver la joie de le siffler ou de l’applaudir ; c’était la dernière coquetterie d’un esprit moqueur.

En avant du cortège s’avançait à cheval un hérault d’armes, coiffé d’un bonnet de fou. Il était suivi par des musiciens en costumes turcs et tous également à cheval. Puis venait un enfant blond, beau comme un ange, vêtu en Amour, assis sur un ours apprivoisé qu’il dirigeait avec une chaîne d’argent.

Derrière l’Amour victorieux, venaient trois chars de triomphe, tirés par des hommes, affublés d’oreilles d’âne. Le premier était couvert de palmes triomphales et de roses. Sur un autel, on voyait un miroir et une collection du journal la Vérité.

On n’avait pas osé représenter d’une façon plus sensible Nadège et sa puissance.