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L’ENNEMI DES FEMMES

Le char suivant était rempli de jeunes femmes et de jeunes filles qu’on avait choisies dans la population la plus honnête de la ville et de la campagne ; elles représentaient l’élément féminin, vainqueur par son essence même, sans besoin d’y joindre le génie.

Dans le troisième char enfin, Diogène avait accordé qu’on entassât les dossiers, les in-folios du fameux greffe de l’amour. Deux cavaliers avec un bonnet de fou, dont l’un portait au haut d’une perche une énorme pantoufle et l’autre un bonnet de nuit gigantesque, fermaient la marche.

Il faut bien se souvenir du pays où s’est passée la comédie que je viens de raconter, de l’époque qui excusait cette mascarade, et d’un grand besoin d’épanouissement, de gaieté, qui emplissait et dilatait les esprits les plus sérieux, pour comprendre, pour tolérer cette fête.

Nadège faisait contre fortune bon cœur. Elle eût voulu s’en tenir à la scène du porche. Elle avait redouté un épilogue grotesque ; elle n’osait s’en fâcher ; mais tout bas elle soupirait, sans pourtant s’empêcher de sourire.

Le cortège défila sous les fenêtres du journal, et Diogène invita Nadège à aller l’attendre avec lui sur la place de la ville, au balcon de la maison Pirowski.

C’était là en effet que la cérémonie devait s’achever. Au bout d’une heure, la mascarade, après avoir parcouru les grandes et les petites rues, vint