femme aux boucles de cheveux noirs. Son visage est recouvert d’un masque ; son œil brille d’une lueur singulière et se fixe sur moi. Elle me menace de la main, elle me fait signe. Un éclat de rire retentit à mes oreilles maintenant, un rire âpre qui me donne à la fois le frisson et me plonge dans une extase fiévreuse.
» Je ne puis dormir. Je vais donc essayer de raconter en quelques lignes ce rêve avant qu’il ne s’évapore dans les brouillards du matin.
» Hier, lorsque je me rendis chez Anna, le soir tombait. Je trouvai les enfants auprès d’elle. Ils me tendirent les mains. La petite Lola m’offrit sa bouche rose pour que je l’embrasse. La vue de ces charmantes petites créatures me réjouit profondément. Nous jouâmes aux cartes, à l’homme noir ; Lola bavardait de plaisir à l’idée de me dessiner avec du charbon de grosses lunettes autour des yeux. Je ne sais comment nous en vînmes à parler du bal masqué que donne la société de notre ville en carnaval. Anna me demanda si j’avais l’intention de m’y rendre.
» — Y penses-tu ! sans toi ? répondis-je.
» — Pourquoi non ? Nos dames prétendent, à ce qu’il paraît, que je suis si peu sûre de toi, mon doux être, que je suis obligée de te tenir absolument sous clé. Je t’en prie, va au bal.