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VII

NOUVEAU PAS VERS LE BUT

« Tout visage est comme un livre où se trouvent d’étranges choses. »
SHAKESPEARE (Macbeth.)

Pendant trois longs jours, qui lui parurent une éternité, le comte attendit un message de Dragomira. Le soir du troisième jour, Barichar, sous la livrée d’un domestique de grande maison, apparut au noble club où jouait Soltyk et lui remit une lettre. Le comte la parcourut.

« J’y vais, » dit-il. Il glissa une pièce de monnaie dans la main de Barichar, descendit promptement l’escalier, sauta dans sa voiture, rentra chez lui et fit sa toilette avec un soin méticuleux.

Une heure plus tard, sa voiture s’arrêtait devant la maison de Dragomira. Il la renvoya et monta l’escalier conduit par Barichar. Celui-ci ouvrit la porte et Soltyk se trouva dans une chambre de réception. Au moment où il ôtait sa pelisse, Dragomira vint à lui et lui tendit la main.

« Êtes-vous seule ? demanda-t-il en portant la main de la jeune fille à ses lèvres.

— Oui. »

Dragomira retira doucement sa main et s’assit devant la cheminée. Le comte, les deux mains posées sur le dossier du fauteuil qu’elle lui avait indiqué, cherchait à lire sur son visage. Mais ce visage était froid et fermé comme d’habitude, et les beaux yeux bleus avaient pareillement leur éclat glacial.

Malgré son émotion, Soltyk remarqua que Dragomira s’était faite belle pour lui. C’était la première fois qu’il la voyait à la maison en négligé, dans cette mise que les jolies femmes