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LA FEUILLE BLANCHE

Un frisson glacé lui courut le long du dos.

— C’est vous qui le perdiez, railla-t-elle, quand vous me donnâtes votre signature sur une feuille blanche. Dès demain, le chèque vous sera présenté.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! soupira Saint-Renaud en se laissant tomber sur une chaise, comblent ferai-je pour le payer ?

— Rassurez-vous, je viendrai en aide à votre ingéniosité, intervint méchamment la comédienne. Je vous ferai enfermer dans la Tour pour dettes. Là, vous aurez le loisir de méditer sur les moyens de me solder.

— Cinq millions ! se lamentait le financier, une pareille somme dévore ma fortune. Ayez pitié de moi, Mademoiselle !

— Pitié, moi ? La comédienne éclata de rire. Vendez votre maison de Paris, votre propriété de Versailles, vos biens, vos équipages, vos joyaux, cela suffira bien, en fin de compte.

— Oui, cela suffira, gémit Saint-Renaud, mais moi, que deviendrai-je ?

— Vous ? vous pourrez balayer les rues, répondit la Gaussin avec une froideur de marbre. C’est, à ce qu’il paraît, une occupation excellente pour la