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LA PANTOUFLE DE SAPHO

— Mille écus ? s’écria-t-elle, le dixième suffirait. Cent écus.

— Vous les aurez, assura la Schrœder. Mais j’entends le vacarme de notre arche de Noé. Babette, donne-moi ma pelisse.

D’un geste rapide, elle glissa dans la chaude fourrure et descendit majestueusement les marches de l’escalier. La vieille Muller suivit, toujours enveloppée de son fichu.

Le Burgthéâtre était plein à s’étouffer, jusque dans les plus petits recoins. Un public de choix attendait avec une impatience fébrile le lever du rideau. Au premier rang, se tenait, à sa place accoutumée, Félicien Wasilewski, en proie à une agitation extraordinaire. Il se levait, se rasseyait, couvrait son visage de ses mains et déchirait son mouchoir de poche en mille petits morceaux. Enfin, la pièce commença. Le premier acte se passa dans l’habituel mouvement d’une salle trop pleine. Mais les mots du chœur : « Salut ! Sapho, Salut ! » eurent un effet magique. Il se fit un profond silence et tous les regards se tournèrent vers Sophie, faisant son entrée sur un char de triomphe, comme un être que la nature a créé pour dominer.