Page:Sacher-Masoch - Le legs de Caïn, 1874.djvu/257

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— Je ne sais si vous êtes un Faust comme celui-là, répliqua Marcella d’un ton froid ; mais ce que je sais, c’est que je ne suis pas la Marguerite qui se jetterait à son cou.

VIII

À quelques jours de là, nous étions à nous promener sous les antiques tilleuls du parc. L’air était pur et tiède, le soleil dorait le feuillage et les herbes, qu’une brise légère remuait à peine. Nous gardions le silence, et cependant nous sentions l’un et l’autre qu’il fallait parler.

— Mon temps est fini, dis-je enfin, je te quitterai dans peu de jours. Pourtant je ne voudrais pas partir sans être fixé sur ton avenir. Es-tu décidé à prendre Marcella pour femme ?

— Oui, me répondit-il d’une voix grave.

— Tu ne crains pas ce qu’en dira ta famille ?

— Mon ami, s’écria le comte, et son cœur débordait, je ne peux plus vivre sans elle. Pourtant ne me crois pas aveugle, ma résolution est d’accord avec ma raison. J’ai sur le mariage des idées que l’expérience de la vie et la réflexion fortifient et confirment chaque jour. Le fondement, le principe de l’union des sexes est sans nul doute l’amour physique, ce désir qui nous traverse comme un éclair. Cependant la nécessité d’une alliance durable, d’une alliance qui dure au moins tant que grandissent les enfants, fait naître le besoin d’un accord intime des âmes. Si donc la satisfaction des