voulu vous déranger ; mais ne sais-tu pas que ceci est ma maison ?
Il tremblait, sa voix tremblait aussi. — Fais de moi ce que tu voudras, me répondit-il.
— Qu’est-ce que tu veux que je fasse de toi ? Mais as-tu quelque notion de l’honneur ? Il nous faudra échanger une couple de balles.
Je l’éclairai encore jusqu’au bas de l’escalier, puis je montai à cheval, et je courus chez Léon Bodoschkan pour le prier de me servir de témoin. Il m’écouta en souriant tristement. — Au fond, c’est une sottise, me dit-il ; mais sois tranquille, avant demain matin tout sera réglé. Fais-moi seulement l’amitié de lire ces feuillets cette nuit. — Il me donna ces papiers que je vous ai montrés, et qui ne m’ont plus quitté depuis. Un homme étrange !
Je me mis donc à les lire ; je n’en avais pas besoin. Je venais de provoquer l’amant de ma femme, c’était pour la forme. Je savais très bien que j’étais dans mon tort ; mais l’honneur !… vous comprenez. J’étais sûr qu’il me manquerait : à quinze pas, il ne distinguait pas un moineau d’une meule de foin ; moi, je tire bien. Je pouvais donc me venger, le tuer, personne n’aurait eu un mot à dire ; je ne m’en reconnaissais pas le droit, et je tirai en l’air. J’étais aussi coupable à mes yeux que lui ou elle.
Je songeais d’abord à me séparer de ma femme ; mais il y avait les enfants. C’est là ce qui nous rive ensemble par couples pour l’éternité et nous pousse dans l’ouragan, comme les damnés de l’Enfer du Dante… Avez-vous remarqué, monsieur, comment,