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Page:Sacher-Masoch - Les Batteuses d’hommes, 1906.djvu/10

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saient, s’imprégnaient de cruautés, de ténébreuses chimères, de perverses souvenances, décelaient quelque détraquement, quelque complication anormale dans les rouages de cette âme simple, charmante de puérile pensionnaire dont la chair virginale sommeille encore impolluée.

… Nous avions d’abord souri — comme d’un intermède amusant — tandis qu’elle appuyait de toute une mimique heurtée et violente ses théories sur l’Amour, qu’elle y ajoutait la saveur d’un accent guttural, traînant, rude et câlin à la fois de nomade née sous la tente, qu’elle s’énervait, s’interrompait tout à coup les sourcils froncés, les dents crissantes en la bouche que crispe une moue querelleuse.

Et voici que chacun s’accoudait sur la nappe où courait une débandade de petits verres poisseux, de bouteilles, l’écoutait en un trouble instinctif, s’intéressait à ces dépravations ignorées dont elle se faisait l’apôtre, des mirages d’Eden, de terre promise dans son regard fixe, des séductions dans ses longues mains blanches, souples, impérieuses de sacrificatrice…

« Alors, disait Séraphita, ses pâles joues empourprées par les vibrations de son cœur, vous