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MÉTAMORPHOSES

Elle ôta le gant de sa main droite et appliqua un bon soufflet à Plant.

Le clerc devint d’un beau rouge ; ses yeux, froids d’habitude, s’allumèrent. Un baiser brûlant ne l’eût pas mieux électrisé que le coup vigoureux frappé par cette petite main. Il s’empara de la main dégantée et la pressa contre ses lèvres.

— Me voici revenu tout à fait à moi, articula-t-il, et je vous jure que je vous adore, bien que…

— Je ne sois pas une comtesse, acheva sa belle compagne avec un sourire.

Marie Peneke était réellement belle, belle de la beauté antique, de la beauté du Titien, de Véronèse, et aussi de cette beauté voulue par le goût moderne, sur lequel le bizarre, le piquant, fussent-ils maladifs, font beaucoup plus d’impression que la saine harmonie et la plénitude des formes grecques.

Marie était une Vénus telle que l’entendaient les Grecs, une Vénus de la tête aux pieds. Pas un défaut dans toute sa personne à la fois déliée comme celle d’une jeune fille et potelée comme celle d’une femme. Chez elle, aucun angle petit ou grand, aucune forme trop accusée. Aussi parfaite que son corps était sa petite tête camée dont le profil semblait avoir été taillé par une main d’artiste dans un magnifique morceau d’ivoire