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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

Après le départ du sculpteur, toute retenue cessa dans la chambre du baron. Marie apporta des flacons de vin et des gâteaux froids. Les officiers se mirent à leur aise, débouclant leurs ceinturons, défaisant les agrafes dorées de leurs dolmans. Keith se costuma en femme une seconde fois et siégea parmi ses hôtes. Il singeait tantôt les gestes hardis d’une demi-mondaine, tantôt les manières sans gêne d’une coquette aristocratique. Ses camarades lui faisaient la cour à qui mieux mieux. Puis, l’un d’eux ayant tiré un jeu de cartes de sa poche, ils se mirent à jouer le « onze et demi », à boire, à chanter, à s’échauffer de plus en plus. Au moment où ils faisaient le plus de bruit, Marie reparut au milieu d’eux pour demander si ces messieurs désiraient quelque chose.

— Nous ne désirons que vous, s’écria l’un des hussards.

— Tenez-nous compagnie, ajouta un autre.

— Ce ne serait pas convenable, répliqua la jolie fille. Que diraient mes parents ?

— Foin des parents ! fit Keith, qui avait déjà trop bu ; restez avec nous, Marie.

Il se leva et la prit par la taille.

— Lâchez-moi ! cria-t-elle avec force.

Son amour-propre la poussait à se révolter contre toute violence ; mais le baron n’avait plus