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UN HEUREUX DÉBUT

les chalands à sa place. Mais ce genre de vie lui allait à peu près comme un jupon et un corsage de paysanne peuvent aller à une princesse : elle avait l’air de jouer avec les robes, et s’il s’agissait de vendre quelque chose, les acheteurs riaient de sa manière de faire.

Un jour, après s’être bourré le nez de tabac au point qu’il ressortait comme une cheminée pleine de suie au milieu de sa large face plate, madame Peneke dit à sa fille adoptive :

— Marie, ton amourette avec Plant et le scandale avec le baron t’ont fait perdre la considération du monde ; mais je ne crois pas trop m’avancer en t’assurant que tu peux promptement reconquérir ton bonheur perdu, en menant une existence laborieuse.

La jeune fille répondit d’abord à ces paroles par une moue, une moue si dédaigneuse, que madame Peneke en fut peinée jusqu’au plus profond de son âme.

— Si je travaille, s’écria-t-elle ensuite, c’est à cause de toi ; mais ne me dis pas que le travail est respecté, qu’il honore. On ne respecte pas le travail, on ne respecte que l’argent ; et l’argent gagné à la sueur de notre front est moins apprécié que celui dont nous héritons sans peine, ou celui que la honte, les spéculations amènent dans notre