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LES PRUSSIENS D’AUJOURD’HUI

— Tu viens à une heure désagréable, lui cria-t-elle à son entrée, pour te punir tu vas m’aider.

— Aider ! En quoi ? demanda Andor qui la voyait assise à sa petite table en palissandre, le porte-plume entre ses dents blanches et sa jolie main tachée d’encre.

— Puisque tu n’écris pas sur moi, il faut bien que je le fasse, répondit-elle.

Elle se renversa dans son petit fauteuil et sourit à Andor en battant la mesure contre la table du bout de son pied.

— Comment ! tu écris pour les journaux et sur toi, par-dessus le marché ? s’écria-t-il avec animation.

— Oui, j’avoue que je m’adonne à cette magie noire, répliqua-t-elle d’un ton moqueur. Mais crois-moi, Andor, je ne fais que ce que d’autres ont fait encore plus en grand. Pour arriver aujourd’hui, il faut se louer soi-même, comme Richard Wagner, ou déprécier tous les autres, comme Paul Lindau. Quand on ne peut être grand soi-même, on fait les autres petits, si petits qu’ils ont l’air de ne plus nous dépasser. Par le fait, il en résulte fort peu de chose ; Gœthe reste Gœthe, Gottschall Gottschall et Paul Lindau Paul Lindau ; mais c’est néanmoins un plaisir.

Peu de temps après, Valéria fut habiter sa villa.