Page:Sacher-Masoch - Les Prussiens d’aujourd’hui, 1877.djvu/765

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
355
LA MORT N’ÉTAIT PAS INVITÉE

vous me donnerez, non devant le monde, dans votre cœur. Si je n’ai plus sur terre que vous, il faut que je vive entièrement de votre existence. La grandeur seule peut me faire oublier les mesquines méchancetés des hommes. Je veux penser avec vous, sentir, résoudre, créer, détruire, condamner, faire grâce ; je veux gouverner avec vous.

— Tout, tout ce que vous voudrez, Hanna, s’écria le roi. Oh ! comme vous m’avez rendu heureux ! Jusqu’ici je n’ai fait que bien peu pour mon pays, mon peuple. Je me courbais sous le poids lourd de mon mécontentement ; mais maintenant je me sens délivré par votre amour ; la vie me sourit à nouveau ; je suis fort et libre.

Grâce à vous, Hanna, tout changera, changera pour le mieux. Gouverner ne sera plus un fardeau pour moi ; ce sera une joie, un besoin ; mais… il me semble qu’on vous cherche.

Il abandonna la main de la générale qu’il avait de nouveau prise et baisée, et s’éloigna d’elle de deux pas.

Madame de Kronstein se montra sur le seuil.

— Mon Dieu ! s’écria Hanna qu’y a-t-il ? Vous apportez une mauvaise nouvelle ?

— Ne vous effrayez pas, répondit la maîtresse de la maison avec cette hypocrisie sentimentale dont nos femmes ont si bien l’habitude. Votre