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UNE FAMILLE COMME IL Y EN A PEU

Près du capitaine logeait sa sœur, Régina Gerling, vieille demoiselle à figure lisse dont le plus grand bonheur était d’avoir des invités à la maison et de cuisiner pour eux. Elle lisait de préférence les Heures de rêverie. Elle ne dédaignait pas toutefois de faire par-ci par-là la connaissance de quelques-uns des héros d’Alexandre Dumas ou d’Eugène Sue. Son idéal de jeune fille avait été Richard Cœur-de-Lion ; en ce moment elle avait un faible secret pour le comte de Monte-Christo et trouvait le Juif-Errant un homme très-intéressant.

Madame Andor avait sa chambre au premier.

Veuve d’un conseiller de régence, elle touchait, comme son frère le capitaine, une petite, petite pension. Ses habits avaient la coupe de mil huit cent vingt, la taille courte, à plis, non qu’elle aimât cela, mais parce que les deux vêtements de soie qu’elle avait dataient du jour de son mariage. Son petit bonnet était blanc comme de la neige nouvellement tombée. Elle égayait toute la maison de sa bonne figure avenante qui, malgré ses petites rides sans nombre, était propre, sans tache, autant que la figure d’une innocente jeune fille de quinze ans.

Les jeunes gens lui témoignaient beaucoup de tendresse. Elle était pour tout le monde bonne,