Je vous trouve bien sage de n’avoir pas voulu vous mêler de tout cela……
Les deux petits vases de tôle peints qui sont sur mon bureau, destinés à mettre des fleurs ; ils ont de chaque côté un petit cartouche peint. Il faut les emballer dans de [la] laine ou du coton, et les placer dans une petite boîte.
……Je suis dans mon lit. Ne soyez pas inquiet, cela m’arrive souvent à présent et me gêne bien pour mes affaires. Je n’ai point de fièvre.
Tout est ici assez calme en apparence, grâce, je crois, aux troupes qui en imposent. Les assemblées sont ouvertes. Le tiers s’est enfin constitué assemblée nationale. Il veut juger les pouvoirs de la noblesse et du clergé. Ces deux-ci ne veulent pas ; l’on fait de part et d’autre des arrêtés et l’on perd constamment son temps à disputer.
Le roi vient de défendre cette assemblée jusqu’à ce qu’il ait tenu une séance générale pour tâcher de tout accorder[1], et il a bien fait car le tiers, qui tenait cette assemblée, échauffait les têtes par ses harangues. Il s’en est suivi que la première séance a pensé causer une révolte……
Ici, dans le peuple, l’on dit que la noblesse a brûlé tous les papiers du tiers, que l’on veut faire danser les calotins, c’est ainsi que l’on appelle les ecclésiastiques ; quelques-uns ont été insultés……
Il y a un furieux parti contre M. Necker. Les gens sensés ne savent que penser de lui et attendent la suite pour le juger. L’on a pris des coquins qui coupaient les blés sur pied avant maturité……[2]
Je ne vous ai pas répondu jusqu’à présent, monsieur l’avocat. Vous sentez que la révolution qui vient d’arriver et qui n’est pas encore finie ne rend ni le cœur ni l’esprit tranquilles. Je ne vous fait point de détails ; vous les avez par toutes les lettres et papiers courants.
Je me borne donc à vous dire qu’étant à la campagne, je fus le lundi à Paris pour affaire que je ne fis point, excepté de toucher les douze cents livres que vous m’avez envoyées par une lettre de change sur M. Jaume,