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CORRESPONDANCE INÉDITE DU MARQUIS DE SADE — AN I.


c’est qu’elle l’est au point qu’il est impossible d’y répondre, et je la laisse-là. Je vous dirai à ce sujet que les informations envoyées au ministre les disculpent furieusement ; il n’y a pas une ligne qui ne soit en leur faveur ; cela mettra le ministre dans l’embarras de savoir sur qui maintenant il pourra me donner mon recours. Je vous remercie des peines que vous vous donnez pour tâcher de fouiller les titres qui peuvent me faire payer de ce qui m’est dû[1]. Je sens combien ce travail est ingrat, difficultueux, dangereux même, mais il est si important pour moi que je vous supplie de ne le point abandonner. Il me paraît que vous voyez mal en province sur la Bastille. Ici, c’est un grand honneur que d’y avoir été ; on s’en vante, on l’imprime, et cela vous vaut une sorte de considération. Adieu, je vous recommande mes trois mille vingt francs dont neuf cent vingt tout de suite, et le reste au quinze septembre. Je suis abîmé, rendu, je crache le sang ; je vous ai dit que j’étais président de ma section ; ma tenue a été si orageuse que je n’en puis plus ! Hier, entre autres, après avoir été obligé de me couvrir deux fois, je me suis vu contraint à laisser le fauteuil à mon vice-président. Ils voulaient me faire mettre aux voix une horreur, une inhumanité. Je n’ai jamais voulu. Dieu merci, m’en voilà quitte ! Adieu, pensez un peu à moi ; je vous recommande plus que jamais le soin de mes affaires et vous embrasse.

J’ai fait passer, pendant ma présidence, les Montreuil à une liste épuratoire. Si j’avais dit un mot, ils étaient malmenés. Je me suis tu ; voilà comme je me venge !




  1. Les décrets des dix-huit juin, vingt et vingt-cinq août 1792 avaient supprimé, sans indemnité, les droits de mutation (lods et vente) et les droits annuels (cens, champart, rentes, tasques) dûs aux seigneurs, à moins qu’ils ne puissent présenter un titre ou justifier d’une concession primitive de fonds.