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Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 1, 1795.djvu/166

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on était parti de très-bonne heure, notre compagnie villageoise est arrivée pour dîner. À peine Sophie a-t-elle entendu le bruit du carrosse, qu’elle a voulu se lever pour voler dans les bras de sa nourrice ; nous l’avons contenue. Madame de Blamont, voulant jouir de cette scène attendrissante, sans témoins qui put la refroidir, a laissé le curé un moment avec madame Senneval, et nous a amené Isabeau… Mais tous nos soins alors sont devenus impuissans près de Sophie, sitôt que la voix de sa bonne mère, (c’est ainsi qu’elle la nomme) a pu frapper son oreille ; elle s’est précipitée dans la chambre, et est venue tomber aux pieds d’Isabeau. Le mouvement a été si vif, que nous avons été obligés de la rapporter dans son lit, où elle est restée quelques minutes sans connaissance ; la bonne paysanne s’est jettée sur elle ; elle l’a rappellée à la vie par ses caresses ; elles se sont embrassées toutes deux, et les larmes qu’elles répandaient à grands flots se sont opposées d’abord aux expressions de leur