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Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 3, 1795.djvu/231

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d’être sage, et de ne te point désespérer. — Ô ! Léonore, reprit ma compagne, en se jettant sur mon sein, et l’arrosant des larmes amères de sa douleur ; ô toi ! que j’aime plus que ma vie, ne crains pas que je t’abandonne non plus ; mais laisse-moi le soin de te nourrir…, moins délicate que toi j’y pourvoirai d’une façon plus sûre… Conserve cette vertu imaginaire, dont tu fais le phantôme de ta gloire ; je l’outragerai pour te faire vivre ; et si jamais les remords venaient à déchirer mon ame, je leur opposerais les droits de l’amitié. — Ah ! crois-tu que je pourrais être heureuse, en subsistant du fruit de tes crimes… Écoute, me dit Clémentine, un peu plus calme, je n’ai pas plus envie de me prostituer que toi, je te l’ai déjà dit : il faudra que je sois dans une furieuse extrémité, quand je me jetterai dans un tel abyme ; mais j’ai tout combiné, et malheureusement nul autre moyen que celui-là ne peut nous sortir de cet infâme pays : nos projets, tu le sais,