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Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 3, 1795.djvu/68

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d’un frisson violent ; la frayeur s’en mêla, mon imagination se noircit ; je me crus prête à perdre connoissance ; heureusement je pense aux cordiaux, j’entrouvre un des tiroirs que m’avait indiqué Dolcini… Juste ciel ! quel est mon étonnement quand au lieu des secours que je crois y trouver, ma froide main ne saisit qu’un poignard.

Si jamais je me suis crue au dernier moment de ma vie, je puis bien assurer que c’est dans cette cruelle circonstance ; hélas ! me dis-je, je suis trahie, je suis abandonnée, cette arme m’est offerte pour m’en servir, c’est encore un service que me rend la barbarie de ce monstre, il ne veut pas que je meure de désespoir ; ne balançons pas, toute autre mort serait affreuse, celle-ci l’est moins… Un instant de réflexions me ramena pourtant, je voyais des soins décidés, était-il présumable qu’ils fussent pris pour un être qu’on sacrifiait ? Cette bierre faite avec tant d’art, ces jours si bien ménagés, tout cela pouvait-il s’allier