Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 4, 1795.djvu/27

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Premièrement, on peut nier ces délices ou au moins ne pas les sentir comme vous, mais en les admettant qu’avez-vous fait de bien dans cette action, puisque vous n’avez travaillé que pour vous ? l’égoïsme est-il une vertu ? et ne devient-il pas un vice très-dangéreux, quand il peut résulter de ses effets la mort presqu’inévitable de l’infortuné qui vient de servir à vous en donner les jouissances ? Poursuivons, vous avez cent louis, je le suppose, à jetter aujourd’hui par la fenêtre, un bijou s’offre d’un côté, un malheureux arrive de l’autre ; après avoir balancé un instant, vous renoncez à posséder le bijou, et vous soulagez de cet argent l’homme qui vient vous implorer ; croyez-vous avoir fait une belle action ? vous n’avez fait, sans vous en douter, que céder au mouvement le plus impérieux, plus flatée du plaisir de sortir cet homme de la misère, de mériter sa reconnoissance que de la satisfaction de vous procurer le bijou, vous avez pris ce qui vous contentait davantage, et n’avez travaillé que pour