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Page:Sade - Aline et Valcour, ou Le roman philosophique, tome 4, 1795.djvu/277

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courbant sa tête sur le lit, elle l’entendit avec le plus saint respect.

« Mes amis, nous dit cette femme divine, me voilà prête à me séparer de vous pour jamais. À trente-six ans je devais compter sur une plus longue vie ; mais avec les malheurs dont j’étais accablée, elle n’en fût pas devenue plus utile au bien de mon ame : le moment où je touche est cruel ; on ne s’accoutume pas assez à l’envisager dans le monde, et quelqu’ait été notre conduite, quand il arrive, il nous effraye. Pleinement convaincue de l’existence d’un Dieu juste, j’ose voler sans crainte entre ses bras ; je lui demande sincèrement pardon de ce qui peut l’avoir offensé ; j’aurais voulu lui porter un cœur plus pur,… au moins le lui offrirai-je sans crime ; ce serait pourtant vous tromper que de vous dire que je n’ai pas commis bien des fautes ;… que d’impatiences sous le joug dont il lui plaisait de m’accabler ! je fus sacrifiée bien jeune, et vous savez ce que j’ai souffert ; je m’en suis plaint,