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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK


et à lui assigner dans l’opinion publique le rang qu’il y doit occuper.

Frédéric et son épouse voulurent courir comme les autres ; mais chacun le faisant de son côté, sans se douter que tous deux habitaient la même ville, purent, sans se rencontrer et encore moins se reconnaître, se livrer à cet amusement.

Cependant Frédéric avait appris, depuis qu’il était à Venise, qu’une Saxonne avait trempé dans la révolution, et sachant que sa femme n’était depuis longtemps désignée que par ce nom, il conçut quelque espoir de la retrouver dans cette ville. Mais malheureusement la princesse avait encore mis des entraves à ces recherches ; l’armateur et quelques personnages illustres du gouvernement étaient les seuls auxquels elle eût fait part de sa naissance, et elle les avait vivement priés de bien lui conserver dans la ville l’incognito qu’elle y désirait : d’après cela, nuls indices à tirer pour Frédéric, ni de la voix publique, ni des habitudes particulières de sa femme. Les informations qu’il prit dans le monde ne le conduisirent qu’à savoir qu’il y avait, à la vérité, une dame saxonne logée sur le Rialto, mais qu’on ignorait et son nom et la ville qui lui avait donné naissance. Cependant Frédéric visita les deux ou trois hôtelleries qui se trouvaient dans le Rialto ;