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ADÉLAÏDE DE BRUNSWICK

Aucune femme semblable à celle qu’on cherchait ne parut ; mais un homme, se démasquant et abordant le prince, lui dit avec insolence :

Vous êtes mort si vous vous trouvez demain matin dans Venise.

— Eh bien, dit Mersbourg, une autre fois croirez-vous ce que je vous dis ?

— Elle est donc morte, s’écria le prince en se retirant avec le comte ; je l’ai donc perdue pour jamais ! Cela n’est maintenant que trop sûr !

— Ah ! mon cher prince, dit Mersbourg, en ayant l’air de partager la douleur de son maître, cessons, cessons de nous aveugler sur le malheur. Il paraît toujours si étranger à l’homme, qu’il le repousse quand il veut peser sur sa tête. Partons, prince, partons, que je n’aie pas à déplorer, en revoyant notre patrie, la douloureuse perte des deux objets chéris qui en faisaient tout le bonheur. Il me semble que je vois le glaive suspendu sur vous, et ce n’est point par la main des bourreaux que doit périr le souverain adoré de la Saxe.

Après la nuit la plus affreuse, Frédéric consent enfin au départ, et, dès le même jour, Mersbourg et lui furent coucher à Trieste d’où ils repassèrent en Allemagne.

On s’imagine aisément qu’Adélaïde, uniquement occupée du soin de se dérober à un époux