faits pour être bafoués dans votre métier, costumés
d’une manière grotesque qui fait rire aussitôt
qu’on vous voit, comment voulez-vous imaginer
qu’avec tant de choses défavorables d’un
côté, on vous pardonne des bêtises de l’autre ?
— Vous n’aimez pas la robe, marquis. — Je ne
vous le cache pas, président, je n’aime que les
états utiles : tout être qui n’a d’autre talent que
de faire des dieux ou de tuer des hommes, me
paraît dès lors un individu dévoué à l’indignation
publique et qu’il faut ou bafouer ou faire
travailler de force ; croyez-vous, mon ami,
qu’avec les deux excellents bras que vous a donnés
la nature, vous ne seriez pas infiniment plus
utile à une charrue qu’à une salle de justice ?
vous honoreriez dans le premier état toutes les
facultés que vous avez reçues du ciel… vous les
avilissez dans le second. — Mais il faut bien qu’il
y ait des juges. — Il vaudrait bien qu’il n’y eût
que des vertus, on en acquérerait sans juges, on
les foule aux pieds avec eux. — Et comment voulez-vous
qu’un État se gouverne… — Par trois
ou quatre lois simples déposées dans le palais du
souverain, maintenues dans chaque classe par
les vieillards de cette classe : de cette façon
chaque rang aurait ses pairs, et il ne resterait pas
au gentilhomme condamné la honte affreuse de
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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX