Page:Sade - Historiettes contes et fabliaux, 1926.djvu/269

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE COCU DE LUI-MÊME
251


paraît inquiet de ne pas voir encore la divinité sur laquelle il compte. — Homme impatient, lui dit Raneville, je vois d’ici ce que cherchent vos yeux… on vous a promis une jolie femme, vous voudriez déjà voltiger autour d’elle ; accoutumé à déshonorer le front des maris d’Orléans, vous voudriez, j’en suis bien sûr, traiter de même les amants de Paris : je gage que vous seriez fort aise de me caser au même rang que ce malheureux Raneville dont vous m’entretîntes si plaisamment hier. Dutour répond en homme à bonnes fortunes, en fat et conséquemment en sot, la conversation s’égaie un instant et Raneville, prenant son ami par la main : Venez, lui dit-il, homme cruel, venez dans le temple même où la divinité vous attend. En disant cela, il fait entrer Dutour dans un cabinet voluptueux, où la maîtresse de Raneville préparée à la plaisanterie et en ayant le mot, se trouvait dans le déshabillé le plus élégant sur une ottomane de velours, mais voilée : rien ne cachait l’élégance et la richesse de sa taille, il n’y avait que son visage qu’il était impossible de voir. — Voilà une fort belle personne, s’écrie Dutour, mais pourquoi me priver du plaisir d’admirer ses traits, sommes-nous donc ici dans le sérail du grand Seigneur ? — Non, pas un mot, c’est affaire de pudeur. —