Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/189

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4°. S’il était certain que je n’euſſe vu perſonne depuis mon viol, & ſi j’étais bien ſûre que l’homme qui avait abuſé de moi l’eût fait également du côté que la Nature condamne, comme de celui qu’elle permet. 5°. Si je croyais n’avoir point été ſuivie, & que perſonne ne m’eût vu entrer dans le Couvent.

Après avoir ſatisfait à ces queſtions, de l’air le plus modeſte, le plus ſincere & le plus naïf, — eh, bien ! me dit le Moine en ſe levant, & me prenant par la main, venez, mon enfant, je vous procurerai la douce ſatisfaction de communier demain aux pieds de l’Image que vous venez viſiter : commençons par pourvoir à vos premiers beſoins ; & il me conduit vers le fond de l’égliſe… Eh, quoi ! lui-dis-je alors avec une ſorte d’inquiétude dont je ne me ſentais pas maîtreſſe… eh quoi ! mon pere, dans l’intérieur ? — Et où donc, charmante pélerine, me répondit le Moine en m’introduiſant dans la ſacriſtie ?… Quoi ! vous craignez de paſſer la nuit avec quatre ſaints Hermites ?… Oh, vous verrez que nous trouverons les moyens de vous diſſiper, cher ange ; & ſi nous ne vous procurons pas de bien-grands plaiſirs, au moins ſervirez-vous les nôtres dans leur plus extrême étendue. Ces paroles me font treſſaillir ; une lueur froide s’empare de moi, je chancéle ; il faiſait nuit, nulle lumiere ne guidait nos pas ; mon imagination effrayée me