Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/335

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métier qu’en raiſon du commerce intime qu’elles avaient ſans doute avec les Dieux ; de-là elles furent, pour ainſi dire, aſſociées au ſacerdoce, & jouirent d’une partie de la conſidération attachée aux prêtres. La Chevalerie s’établit en France ſur ces préjugés, & les trouvant favorables à ſon eſprit, elle les adopta ; mais il en fut de cela comme de tout : les cauſes s’éteignirent & les effets ſe conſerverent ; la Chevalerie diſparut, & les préjugés qu’elle avait nourris s’accrurent. Cet ancien reſpect accordé à des titres chimériques, ne put pas même s’anéantir, quand ſe diſſipa ce qui fondait ces titres : on ne reſpecta plus des ſorcieres, mais on vénéra des catins, & ce qu’il y eut de pis, on continua de s’égorger pour elles. Que de telles platitudes ceſſent d’influer ſur l’eſprit des philoſophes, & remettant les femmes à leur véritable place, qu’ils ne voient en elles, ainſi que l’indique la Nature, ainſi que l’admettent les Peuples les plus ſages, que des individus créés pour leurs plaiſirs, ſoumis à leurs caprices, dont la faibleſſe & la méchanceté ne doivent mériter d’eux que des mépris.

Mais non-ſeulement, Théreſe, tous les Peuples de la terre jouirent des droits les plus étendus ſur leurs femmes, il s’en trouva même qui les condamnaient à la mort dès qu’elles venaient au monde, ne conſervant abſolument que le petit nombre néceſſaire à la reproduction de l’eſpece. Les Ara-

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