Page:Sade - Justine, ou les Malheurs de la vertu.djvu/41

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Des-roches (c’était le nom de mon hoteſſe) que j’étais décidée à tout, pour la ſatisfaire. Elle alla chez le financier, & me dit au retour qu’elle l’avait trouvé très-irrité ; que ce n’était pas ſans peine qu’elle était parvenue à le fléchir en ma faveur ; qu’à force de ſupplications elle avait pourtant réuſſi à lui perſuader de me revoir le lendemain matin ; mais que j’euſſe à prendre garde à ma conduite, parce que ſi je m’aviſais de lui déſobéir encore, lui-même ſe chargeait du ſoin de me faire enfermer pour la vie.

J’arrive toute émue, Dubourg était ſeul, dans un état plus indécent encore que la veille. La brutalité, le libertinage, tous les caractères de la débauche éclataient dans ſes regards ſournois. — Remerciez la Des-roches, me dit-il durement, de ce que je veux bien en ſa faveur, vous rendre un inſtant mes bontés ; vous devez ſentir combien vous en êtes indigne après votre conduite d’hier. Déshabillez-vous, & ſi vous oppoſez encore la plus légère réſiſtance à mes déſirs, deux hommes vous attendent dans mon anti-chambre pour vous conduire en un lieu dont vous ne ſortirez de vos jours.

Ô Monſieur, dis-je en pleurs & me précipitant aux genoux de cet homme barbare, laiſſez-vous fléchir, je vous en conjure ; ſoyez aſſez généreux pour me ſecourir ſans exiger de moi ce qui me coûte aſſez pour vous offrir plutôt ma